Tuesday, October 23, 2007
Tha Blue Herb - Life story (THB Recording) 2007
Protégé de Dj Krush à leur début, Tha Blue Herb est un des groupes de rap japonais que l'on ne voit jamais sur le devant de la scène de ce pays qui reste déjà assez discret dans les medias européens, à quelques exceptions près, quand on parle de sa musique. Le Japon, pour ce qui est de sa scène rap, en est resté aux clichés américains de l'époque de 2Pac et de Notorious B.I.G. moins les guerres de gangs. Les yakuzas font encore partie de l'actualité mais la pègre et la violence, marque de fabrique du gangsta rap américain, n'est pas véritablement mis en avant dans cette scène qui compte des rappeurs comme Dabo ou Zeebra dans ses plus gros vendeurs. Deux noms qui ne voudront pas dire grand chose aux lecteurs de ce site. Une seule recherche sur youtube vous rassisera pourtant facilement en vidéo et vous montrera a quel point il n'y a pas grand chose de différent entre les clips de Jay Z et de Busta Rhymes et ceux des deux rappeurs susnommés. A passer en accélerer sans s'arrêter histoire de ne pas perdre de temps. Le vrai sujet de cette chronique est Tha Blue Herb, un des meilleurs groupe de rap indépendant japonais, et peut être même un des seuls (mes connaissances sur le sujet n'étant pas exhaustives).
Tha Blue Herb, si il fallait continuer la comparaison avec les Etats Unis sont au rap japonais ce que les Aesop Rock et El-P sont au pays de Lil Jon. Des anomalies que l'on a du mal a mettre dans le même genre ou a rattacher à la culture hip-hop. Et pour cause, alors que le rap parle de rue avec violence et regret, Tha blue Herb evoque des paysages mélancoliques où les instrumentales electroniques caressent l'oreille avec la même légereté qu'un rayon de soleil. La ville que décrit la musique de Tha Blue Herb est faite de voitures volants doucement et de néon légers, une ville silencieuse que les yeux de Illbostino, rappeur du groupe, regarde défiler devant ses yeux avec mélancholie. Le premier album du groupe, "Still, still dreaming", empruntait beaucoup au rap de rue de Nas et de son "Illmatic", influence assumé et revendiqué par le groupe. "Sell our souls", le deuxième, prolongeait les ambiances dans des instrumentales pratiquement dub et des experimentations sonores jouant sur les boucles et les rythmiques décalés. Un album plus difficile mais aussi plus aventureux. "Life story" continue sur cette route et l'achève en condensant les plages sur des durées plus courtes et des chansons plus variés. Notes de piano, rythmique légère, effets electroniques et flow s'allient et volent alternativement entre eux pour former des instrumentales variées mais qui ne pèsent jamais sur l'oreille.
Et c'est là que nous en venons aux paroles. Comment parler d'une langue que l'on ne comprends pas et dont on ne distingue pas vraiment les mots ? Et bien, avec l'experience d'une écoute attentive d'autres groupes de rap japonais. Même en ne comprenant rien a ce que racontait les rappeurs de Nitro Microphone Underground (dont le premier album éponyme est très recommandable), les mots en anglais et les phrases courtes ne laissait pas de doute sur la facilité de la langue et des paroles. Efficace et accrocheurs, les chansons étaient très sympa mais ne demandait surement pas beaucoup de reflection. Or, ce qui m'a en découvrant progressivement Tha Blue Herb, c'est a quel point le phrasé de Illbistino se sont orientés vers des rimes complexes, des phrases longues au flow alambiqué et surtout une sensiblité a fleur de peau. Et c'est cette voix morne et douce qui surmonte les compositions (dénués de samples) du producteur O.N.O. et amplifie l'émotion douce mais irrépressible qui domine cet album. En épousant aucun des clichés qui font du Japon cette curiosité culturel remplis de mangas, de néons et de perversions incompréhensibles, Tha Blue Herb réalise un film sonore dépeignant une métropole qu'eux seuls connaissent aussi bien et dans laquelle ils vous invitent, la ville de Sapporo, bien loin de Tokyo et de son excitation, une ville que j'aimerais visiter et que j'aime écouter.
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