Saturday, August 01, 2009

Cage - Depart from me (Definitive Jux) 2009


Trois démones gamines entourent un cadavre et arrache des morceaux de chairs tandis que s'échappent des bords des couleurs délavés. Voilà ce que l'on obtient quand on demande à Alex Pardee de réaliser une couverture. L'artiste s'illustre depuis ses débuts dans un style grand guignolesque peuplé de démons et de monstres étranges gonflés par des couleurs pétantes. Un style qui a déjà plu à In Flames ("A sense of purpose" et son single) et The Used ("Lies for the liars" et d'autres singles), entre autres. Il est la raison pour laquelle j'ai d'abord acheté ce disque.

"Hell's winter" était complet, original sans trop l'être non plus. Un bon disque de rap indépendant à la Def Jux comme il en faut. Le rappeur montrait alors sa créativité dans des textes personnels et un flow plus simple que celui de El-P et d'Aesop Rock mais néanmoins inventif par rapport à la moyenne globale (surtout dans le contexte actuel minimaliste proné par le crunk et le hyfy). Le single marquant étant alors "Shoot Frank" où Daryl Palumbo (Glassjaw, Head Automatica) venait poser une mélodie mélancolique et vénéneuse dont on ne pouvait se remettre de la morceur. Un vrai single porteur qui déparaillait pourtant par rapport au reste, moins rock, moins efficace en comparaison. Les fans les plus nostalgiques de la période "Movies for the blind" pouvait alors se voiler la face et s'imaginer que tout cela n'était qu'une passade. Le réveil sera donc d'autant plus difficile pour eux qu'il était alors annoncé.

"Depart from me" est en quelque sorte l'avatar plus pop et punk du "I'll sleep when you're dead", complexe, dense et difficile. Rap + Punk + Electro + Pop = Depart from me. Les refrains sont gros, l'attaque vocale nasillarde fleur bon le punk primaire et bouillant de ressentiment, les instrus composés à coup de guitare bourrés d'effets et de claviers glissent sur la frontière entre la densité et l'efficacité d'une mélodie mémorable et d'un travail complexe et minutieux.

Ce revirement ont le doit surtout à Sean Martin, crédité à la production des deux tiers des instrus mais El-P continue de rester dans le coin et son travail est juste excellent (ce qui rend la perte de tout ce qu'il avait enregistré pour son prochain album, à cause d'un problème informatique, encore plus douloureux). Immédiatement reconnaissable par leurs styles plus electro, les mélodies de El-P ne déteignent cependant pas par rapport au ton résolument rock du disque grâce au fil conducteur qu'est la voix de Cage, son flow et ses textes à l'émotion a fleur de peau. Cage fait de ses insécurités son bling bling et le crache sur l'auditeur, emporté de toute manière par le rythme et les lignes mélodiques de chaque petit single potentiels. Même le semi interlude "Kick rocks", anecdotique au départ, devient un petit plaisir avec lequel je m'amuse a chanter en choeur le refrain quasi crunk.

Dans un interview, Chris Palko aka Cage, avoue qu'il pense toucher un plus large public avec ce disque tout en offensant une partie de ses fans. Il a raison sur toute la ligne. Cependant, voir "Depart from me" comme l'album d'un artiste voulant vendre son cul serait passer a coté de toute la complexité du processus. Tout en étant passablement rock, punk et electro, les albums de Cage ne devraient pas pour autant quitter le rayon rap des disquaires. L'artiste ne part pas sans rien, il n'oublie pas son héritage. Ce n'est pas l'album de la trahison mais une évolution tout ce qu'il y a de plus naturel mais aussi des plus efficaces. Le vrai voyage commence donc aujourd'hui avec un album jouisif et colorés mais aussi cathartique où l'on sent couler toute la vie d'un homme qui exorcise toutes ses émotions et ses ambitions musicales. Pas un si mauvais choix de couverture que ça finalement.

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