Pour un habitué des concerts rock la performance d'un Dj est un dilemme difficile à résoudre. L'expérience live classique et efficace consiste en un savant mélange d'énergie et de décibel. La communication entre le public et les musiciens s'établit par l'émotion qu'ils dégagent sur scène et qui se transmet à tout ceux qui acceptent de rentrer dans la danse pour renvoyer leurs émotions sur scène. Dans le cas présent, un Dj ne dépense pas une dose d'énergie phénoménale pour composer. Il se pose derrière ses machines et s'agite timidement pour activer des sons et non les créer. Voilà en résumé les raisons de mon appréhension en rentrant dans la Maroquinerie. Habitué a voir un spectacle très vivant sur scène, n'allais je pas roupiller sec en regardant un type (certes très respectable, tout les Dj n'ont pas la classe de Dj Krush) appuyer sur des boutons ?
Cela ne fait pas l'ombre d'un doute car, malheureusement, le Dj faisant office de première partie me permit de vérifier ma théorie. Surement plus habitué a un public de soirée qu'a un public rock habitué a voir et a écouter plutot qu'a danser, Soulist n'est pas vraiment l'homme de la situation et mixe devant un parterre attentif et assis. Spectacle rare et un peu étrange, les spectateurs arrivent et s'asseoient sur les marches et au milieu de la salle. Ambiance tranquille et public volubile ... a tel point que le grondement en commun des voix surnagera pendant tout le set de ce pauvre homme. Les sons mixés allant de la soul au rap en passant par le reggae, il y en a eu pour toutes les oreilles durant cet heure complète où les sons s'enchainèrent les uns à la suite avec gout, agrémentés de quelques scratch pré enregistrés. Ce dernier point ne cessera de me déranger durant tout son set et fut à l'origine de mon désintérêt progressif pour ses talents. Ne pas scratcher alors que l'on est Dj cela me semble un peu dommage et, de ce fait, Soulist ne fut qu'un hors d'oeuvre avant l'arrivée de l'homme de la soirée.
Plat de résistance, plat principal, entrée. Dj Krush sera tout cela et bien plus encore. Seul derrière ses platines et son Mac il sera tout ce que son homologue d'ouverture n'était pas. Composant ses musiques a partir de sample et d'un doigté ahurissant dès qu'il commence a faire tourner ses platines, le maitre Krush tiens en haleine son public avec une maestria ahurissant comme je n'en ai jamais vu auparavant. Les titres s'enchainent et l'atmosphère monte jusqu'a transformer le bain de lumière qui auréole ce petit japonais perdu dans sa musique en une source d'attention dont on ne peut se détacher. Les rythmes s'adressent au corps tandis que les sonorités jazz, rap et japonaise s'adressent a l'esprit pour le faire travailler et voguer loin de cette salle qui devient si petite quand on la mesure a la porté de la musique qui nous est présenté. Etant plus ou moins bien connaisseur de la discographie de Krush, je ne saurais dire si celui ci ne présenta que des titres de ses albums ou si il composa sur le vif une partie de son set. Cependant, je retiendrais de toute cette soirée des moments grandiose qui me firent frisonner par leur sensualité et leur maitrise technique mélé a une sensibilité musicale hors paire. Le genre de concert qui démontre que le trip hop, si l'on peut limiter ce que Krush fait a ce spectre sonore, est un "genre" loin d'être mort. Comme à l'habitude, si j'en crois une vidéo trouvé sur youtube, l'enchainement "Organ donor" (de Dj Shadow) suivi de "Kémuri" (le "single" de Krush, tiré de "Strictly turntablized") est grandiose et emporte le set vers sa descente, tout en douceur, pour nous laisser en extase. Un petit rappel tout de même sous la forme d'une improvisation sonore et rythmique etonnement violente, tant et si bien que si l'on avait rajouté de la guitare par dessus l'on aurait put se croire à un concert de Agoraphobic Nosebleed. Une musique qui sait donc prendre des routes inattendus tout au long d'une heure et quart de concert intense et superbe. Le genre d'experience que je revivrais avec joie régulièrement.
Sunday, February 24, 2008
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